Une carrière internationale

1914 "Gheusi [directeur de l'Opéra-Comique] n'éprouve aucune sympathie pour elle. Il lui fera les pires vexations pour une artiste, l'affichant au dernier moment, ou lui retirant le rôle sans la prévenir, juste en arrivant au théâtre. Par chance pour Ninon, elle sera soutenue par Xavier Leroux et par sa femme Mme Héglon. Leroux est à cette époque le célèbre compositeur du Chemineau qui avait remporté un grand succès lors de sa création salle Favart en 1907. Il a pu obtenir de Gheusi sa programmation dans Manon de Massenet, qui fut un succès. Gheusi ne la félicitera pas.

Le salut viendra durant un gala où en avril 1916 elle chantait Manon avec Charles Friant, au profit des blessés de guerre. Dans cette salle du Palais des Glaces se trouvait le directeur du Colon de Buenos Ayres. Il veut engager Ninon : elle accepte immédiatement, dénonce son contrat avec Gheusi et part pour l'Argentine, via l'Espagne pour débuter au Colon le 25 mai 1916 dans Faust de Gounod. Le Président de la République est dans la salle, et le tout Buenos-Ayres l'accueille avec force applaudissements. Elle retournera en Amérique du Sud plus de dix saisons. D'ailleurs, les impresari n'engageaient la troupe que si Ninon Vallin en faisait partie...

C'est en 1928 qu'elle montrera à Manuel de Falla toute l'étendue de son immense talent en chantant le même soir à l'Opéra-Comique La Vie Brève et L'Amour Sorcier. Il fut très impressionné par le talent et la puissance artistique de Vallin dans cette performance. Ceux qui connaissent l'espagnol reconnaissent à Vallin la perfection de cette langue.

De retour en Amérique du Sud, elle est atteinte en 1918 par la grippe espagnole qui faisait d'immenses ravages, et sera mise en quarantaine à Sao Paulo. Si ce n'était le dévouement d'un médecin brésilien, Ninon Vallin en serait morte. C'est là, dans son lit qu'elle apprendra le 11 novembre la fin de la guerre.

Elle venait de triompher dans Manon avec Enrico Caruso et Vallin sera marquée par la gentillesse du célèbre ténor, au faîte de sa gloire...

Elle fit le tour de la Méditerranée, accueillie comme une reine en Grèce, Turquie, Egypte, Algérie, Maroc, Tunisie.

En 1934, elle chante Carmen et Faust à San Francisco ; donne des concerts à New-York et à Washington, à la Maison Blanche, elle donne un récital privé pour le Président Roosevelt. L'année suivant, le gouvernement français lui demande d'effectuer une tournée en URSS et de faire connaître la Mélodie Française aux soviétiques, elle va les séduire avec Chabrier, Gounod, Bizet, Fauré et Debussy.

Lors de la visite en France des souverains anglais en 1938, la Reine a demandé au président Lebrun d'entendre Ninon Vallin à la réception officielle qu'il donnait au Palais de l'Elysée, la Reine ayant déjà entendu Ninon en 1929 à Londres.

Elle fut l'amie des grands musiciens de son temps comme R. Hahn, L. Beydts, A. Roussel, M. de Falla, I. Nin, P. Paray. Elle reçut l'estime de Gabriel Fauré, de G. Charpentier, et évidemment de Claude Debussy à qui elle doit sa carrière... (Henri Goraieb, une voix qui s'est tue ; opéra pour tous n°1 janvier 1987, dossier d'artiste B.N.)